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Il faut laisser tomber la neige
Une peinture à partir d'un modèle photographique
Franz Gertsch transcende l’instant figé de la photographie, lui donne vie et l’immortalise dans un même geste, celui de la peinture. En 1969, à 39 ans, il fixe le protocole de son travail : sa peinture aura pour modèle la réalité objective que lui fournit l’appareil photographique. Il explique que « La réalité ne peut plus être saisie qu’avec un appareil photographique, car l’homme s’est habitué à considérer la réalité photographiée comme le rendu maximal du réel » tout en précisant qu’un « tableau doit rester un tableau et ne pas se substituer à la réalité ». Ses modèles sont des images qu’il a photographiées lui- même : amis, famille, anonymes qui acceptent de poser pour lui dans des mises en scène photographiques. L'artiste peut aussi utiliser des images qu’il trouve dans des magazines ou photographier sans mise en scène préalable. C’est une évidence notamment pour les œuvres récentes, réalisées à partir de photographies de paysages. Le peintre est aussi photographe et metteur en scène, gérant accessoires, éclairage, position des acteurs. Il sait qu'au moment de la prise de vue que les images ne resteront pas des photographies et qu'elles serviront de base iconographique pour sa peinture. Son regard de peintre-photographe va permettre de former des photographies-futures-peintures. Quand les images sont sélectionnées, Frantz Gertsch en tire des diapositives projetées en très grand format sur une immense toile blanche. Frantz Gertsch fixe l’image sur la toile. La soumission à l’image est donc complète. (...) Source WikipédiaVoir l'image
Feiern wir zusammen
Je suis partie à quinze ans, juste après l’école obligatoire. Mon père était très sévère, colérique. Si sa journée commençait avec un verre de vin, on devait s’attendre à ce qu’il devienne méchant. Par contre quand il réclamait du café plutôt que du vin on savait que le reste du temps se passerait plus ou moins bien.
Il était constructeur de mur de pierres, ces très beaux murs qui chez nous se font sans ciment. Il buvait et fumait beaucoup. Le bout de ses doigts est tout jaunes. Il a abandonné ma mère très tôt pour aller vivre avec une autre femme dans le village mais ne voulait pas divorcer. Alors on a aidé ma mère, mes frères et sœurs et moi. J’étais soulagée qu’il parte, vous savez, les avants bras de ma maman étaient couverts de cicatrices. Quand il était très fâché il lui donnait des coups de couteau.
J’ai ensuite travaillé dans une famille près de mon village où je devais m’occuper d’un jeune garçon handicapé. Je gagnais environ100 euros par mois et avais le dimanche après-midi de congé. Ça a été dur mais un jour j’ai appris qu’une famille portugaise installée en Suisse cherchait quelqu’un pour le ménage et c’est comme ça je suis partie. Mais là aussi c’était difficile. Mon salaire était de 300 francs et ces gens, qui pourtant venaient de près de chez moi, étaient très sévères. Mais plus tard, j’ai rencontré des personnes qui m’ont beaucoup aidée….
Après 25 ans de séparation, il voulait finalement divorcer de ma mère mais au moment de faire les papiers, il est retourné vivre chez elle. Peut-être parce qu’il était malade, ma mère a accepté. Après tout ce qu’il lui avait fait ! Pour moi ça a été incompréhensible.
(...)
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Haute Autorité de santé,
AMENDEMENT N°2310 de l’assemblée nationale
« Art. L. 7123‑2‑1. – L’exercice d’une activité de mannequin est interdit à toute personne dont l’indice de masse corporelle, établi en divisant son poids par sa taille élevée au carré, est inférieur à des niveaux définis, sur proposition de la Haute Autorité de santé, par arrêté des ministres chargés de la santé et du travail.
« Un décret en Conseil d’État définit les conditions dans lesquelles toute personne qui exploite une agence de mannequins ou qui s’assure, moyennant rémunération, le concours d’un mannequin, veille au respect de l’interdiction définie à l’alinéa précédent. »
« Art L. 7123‑27. – Le fait pour toute personne qui exploite une agence de mannequins ou qui s’assure, moyennant rémunération, le concours d’un mannequin, de ne pas veiller au respect de l’interdiction définie au premier alinéa de l’article L. 7123‑2‑1 du présent code, est puni d’un emprisonnement de six mois et d’une amende de 75 000 euros. »
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IL est tard
Il est tard. Niels nous a parlé de ses projets, de son livre. Fabienne nous a comblé avec ses délicieuses pizzas cuites dans son four à bois, Eric nous a enveloppé de sa gentillesse, Anna nous a appris un mot en Ukrainien que j’ai déjà oublié, il y a aussi ce jeune couple de sinologues, aussi tendres que discrets qui prépare son voyage de noce au Japon, Mélinée, mélancolique princesse grecque tout en rayures, et Sophie qui capte des bruissements des conversations avec son filet à papillons.
Et le silence, qui tout à coup s’invite….
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Rocky
Rocky, couleur plancher (synthétique), flippe... parce qu'il sent qu'à l'atelier, Monsieur N'go mange les comme lui.
Le chien c'est miam-miam dit-il.
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Same to you two !
...cette image m’a coûté un franc. Et j'ai aussi appris que sa chienne était nerveuse mais qu'elle aimait qu'on la photographie.
-Merry Christmas !
-Same to you two !
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Aidez-moi si vous le pouvez
Depuis plus de deux ans, avec une constance helvétique, à l’angle de la poste, l’accordéoniste roumain fait pleuvoir des piécettes dans son escarcelle. Un peu plus loin, trois jeunes adultes moulinent des bras autour d’un stand mobile où sourit un petit africain qui semble dire : Aidez-moi si vous le pouvez. La semaine passée c'est au sort des animaux maltraités qu'ils cherchaient à nous associer. Pendant ce temps, collés aux façades du pompeux bâtiment postal, sur des airs de rap, des ados sautent dans les airs comme des grenouilles.
Et les passants passent, indifférents, sans doute trop préoccupés par le repas de Noël à venir...
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Chambre 620
Vous suivez la ligne bleue, prenez l'ascenseur de gauche, montez au huitième.
Annoncez-vous à l'infirmière me dit une plaquette collée sur la 620.
Ça fait bien trois ans que je ne l'ai pas vu.
Autour du panneau SOINS INTENSIFS pendouillent des boules de Noël.
Je suis tendu, mes mains tremblent.
Vous pouvez y aller, mais ne vous approchez pas du lit, ne touchez pas le malade.
Bonheur de le voir sourire, sa femme aussi.
Ce que nous disons n'a aucune importance.
Seule la présence compte.
Pourtant il me parle de la sortie qu'on lui permettra pour Noël. Deux jours seulement. Me dit sa femme. Trois répond-t-il . Elle sourit.
En ambulance jusque dans sa maison dans les plis du Jura.
Je préférerais y aller avec mon 4/4, il est très confortable, c'est un Pullman.
Une autre personne. Je me lève. L'embrasse, il ne faut pas. Tant pis.
La ligne bleue. La sortie.
Sur mon deux-roues, pense à nos voyages, à la Namibie.
Trois ambulances, en barrage, bloquent la route. Nous défilons comme on défile à un enterrement pour saluer la famille. Un manteau de fourrure est en boule à quelques mètres d'une femme immobile.
Puis pris par le flux, jeté vers ma journée.
Un jeune casqué d'écouteurs traverse avec une nonchalance admirable un troupeau de voitures qui rugit.
Comme si la vie lui était égale alors que dans la chambre 620
Elle est si précieuse.
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Octave de Gaulle
"C'est à la suite d’entretiens avec un sous-marinier qu'Octave de Gaulle perçoit les enjeux de la consommation d'alcool en situation de confinement (...) L'alcool peut-être un remarquable vecteur de convivialité, (dans l'espace) comme il peut s'avérer un problème de taille..."
Octave, le petit fils de celui à qui on a donné son nom à un porte-avions, se demande avec un sérieux qui m'a d’abord fait perdre le mien (croyant d'abord avoir affaire à un transfuge de Plonk et Replonk) comment se beurrer le cornet dans l'espace avec du Bordeaux sans s'en foutre plein la combinaison. Il dessine alors une bouteille qui ressemble à un urinoir, étiquetée grand-cru. Derrière la mimi souriante on distingue l'aménagement du space-ship où chacun peut coincer entre les fesses des coussins son matos pour ne pas qu'il ne flotte dans tous les coins.
"La bouteille que conçoit Octave de Gaulle est torique (en forme d'anneau). L'objet peut donc être stocké et rempli à plat sur terre, tandis qu'en apesanteur, il sera pratique à attraper et manipuler, à transporter autour du bras ou encore à accrocher à l'aide d'une sangle."
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Unterseebootsflottille
La lumière et le public pénètrent dans l'inexpugnable base de la douzième Unterseebootsflottille (U-Boat). Une aile de ce tombeau de six cent mille mètres cubes de béton est transformée en centre culturel. Y est exposée l’œuvre de Ferrante Ferranti, photographe qui prône des valeurs éminemment humanistes, valeurs caramélisées dans les mots par l'écrivain Dominique Fernandez. Mais ça ne suffit pas pour se débarrasser du malaise qui suinte dans ces murs où restent emmurés pour toujours les dépouilles de ceux qui se sont épuisés à édifier la grandeur du III Reich.
La culture contre la guerre ? Plutôt l'amour. J'ai vu un couple s'enlacer et amener de la lumière dans ces catacombes...
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Je fais mon marché
Comment trouver dans la réalité les promesses de mon imagination ?
Se dit-il en exhalant son petit nuage intime.
Comment s’émerveiller de ce que je ne peux pas voir, sinon être déçu par ce que j’imaginais voir ?
Pense simultanément le photographe.
Branlette cérébrale ?
Pas tant que ça.
Parce que la réalité vaudra toujours plus que de la restituer.
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Buée d’or
07 heures 15 – en direction de Genève sur mon scooter :
-Qu’est-ce que vous avez dans votre sac ?
Je relève le heaume de mon intégral, le bout des doigts froid, surpris par la question.
-Une pomme, une poire et un appareil photo, Monsieur...
L’homme en noir tient une lampe de poche dans la main. Plus loin deux de ses collègues encadrent la route, mitraillette au poing.
Chaque véhicule est arrêté, chaque conducteur interrogé.
-C’est bon, allez-y !
« Le niveau de vigilance reste élevé vendredi et les policiers ont renforcé leur présence et leurs contrôles aux abords des lieux sensibles du canton, comme avait notamment prévenu le Département de la sécurité et de l'économie (DSE) du conseiller d'Etat Pierre Maudet jeudi. Selon un agent de sécurité des Nations unies, cité par Reuters, "quatre hommes" seraient recherchés, mais le DSE ne confirme pas ce nombre... »
Sources TDG
Post scrotum :
Pour me remonter le moral et me laver de la parano ambiante, je décide d’assister au lever du soleil. Aperçois une vieille connaissance qui batifole sous l’eau. Au moment où il fait surface, émerge le soleil qui transforme en or la buée qu’exhale l’homme-grenouille.
Post Tenebras Lux !
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On se dit TU ?
Prends un chariot
Dépose ta poussette
Laisse-nous te proposer ce qui devrait te plaire
Profite de nos actions
Va les chercher toi-même dans nos dépôts
Transporte-les vers la caisse
Pour ton confort, scanne toi-même tes achats
Si tu as besoin d’aide, nous sommes à ton service
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Didier, la photo, sa sœur, ses amis.
Didier, au Cesco*, vernit ses photos, heureux de savoir qu'il peut retourner chez lui en fin de semaine.
*Centre de médecine palliative où sont pris en charge les patients adultes avec une maladie cancéreuse avancée ou une maladie non cancéreuse en phase avancée (cardiopathie, accident vasculaire cérébral, hépatopathie, insuffisance rénale, insuffisance respiratoire, maladie neuro-dégénérative, …) relevant de la médecine palliative.
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Aragon
Fernand, spécialiste d'Aragon
Rien n’est précaire comme vivre
Rien comme être n’est passager
C’est un peu fondre comme le givre
Et pour le vent être léger
J’arrive où je suis étranger
Un jour tu passes la frontière
D’où viens-tu mais où vas-tu donc
Demain qu’importe et qu’importe hier
Le coeur change avec le chardon
Tout est sans rime ni pardon
Passe ton doigt là sur ta tempe
Touche l’enfance de tes yeux
Mieux vaut laisser basses les lampes
La nuit plus longtemps nous va mieux
C’est le grand jour qui se fait vieux
Les arbres sont beaux en automne
Mais l’enfant qu’est-il devenu
Je me regarde et je m’étonne
De ce voyageur inconnu
De son visage et ses pieds nus
Peu a peu tu te fais silence
Mais pas assez vite pourtant
Pour ne sentir ta dissemblance
Et sur le toi-même d’antan
Tomber la poussière du temps
C’est long vieillir au bout du compte
Le sable en fuit entre nos doigts
C’est comme une eau froide qui monte
C’est comme une honte qui croît
Un cuir à crier qu’on corroie
C’est long d’être un homme une chose
C’est long de renoncer à tout
Et sens-tu les métamorphoses
Qui se font au-dedans de nous
Lentement plier nos genoux
O mer amère ô mer profonde
Quelle est l’heure de tes marées
Combien faut-il d’années-secondes
A l’homme pour l’homme abjurer
Pourquoi pourquoi ces simagrées
Rien n’est précaire comme vivre
Rien comme être n’est passager
C’est un peu fondre comme le givre
Et pour le vent être léger
J’arrive où je suis étranger
J’arrive où je suis étranger - Louis Aragon
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Geheimnis
Après avoir assisté à un film sur les vestiges de l’architecture nazie : Provokation der Wirklichkeit (La provocation de la réalité), retour au froid qui me mordille le bout des doigts et du nez. Assis aux pieds d’une maisonnette de poupée dans laquelle sont entassés des livres à donner, j’aperçois mon fils en tailleur écrire dans un de ses carnets. Au moment où j’allais prononcer son nom je me rends compte que la réalité me provoque et que ce fils est le fils d’un autre. Ecrire, assis en tailleur, par un froid pareil doit être dicté par une urgence qui me titille.
« J’écris, parce que je ne peux pas ne pas écrire, malgré le froid, malgré mon cerveau engourdi et mes doigts gelés, les mots me tyrannisent ... » écrit-il peut-être. Ou peut-être pas.
Geheimnis der Wirklichkeit !
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