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Faulkner
Pense à ce grand roublard de Jim Harrison, en allant chercher des croissants pour mes collègues, à son autobiographie romancée, Le Vieux Saltimbanque, dans laquelle il nous fait savoir qu’il a beaucoup mangé bu et baisé.
Je traverse la rue, rejoindre le soleil en ressassant cette devise de Faulkner qu’Harrison a faite sienne : Pour écrire il faut du papier et un crayon. Ça me fait sourire, c’est vrai que parfois on se prend trop la tête pour pas grand-chose. A cet instant précis mon regard tombe sur un morceau de carton en équilibre sur le bord du trottoir. Comment transcrire la devise de Faulkner, l’écrivain, au monde de la photographie ? Pour photographier il faut un appareil photo et de la lumière. Cela suffit-il ?
Je reviens en arrière, surplombe le morceau de carton, le considère, tourne autour et photographie.
A moitié satisfait, je me rends compte que Faulkner a raison mais que souvent, c’est bien plus compliqué que ça. Un morceau de carton flottant dans un bain de lumière ça fait une image, mais qui dit quoi ? Je regarde l’écran, me gratte la tête et aperçois, juste de l’autre côté de la rue, un chauffeur de taxi dans sa voiture, m’observer et sourire.
-Belle journée !
-Pareillement.
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Votre beau taxi nous manque
Bill est en forme et porte haut ses 93 ans. Se donne toujours la peine de nouer sa cravate, de l’assortir à ses pompes et de saluer les dames quand elles attardent un peu leurs regards sur lui.
En voilà une justement, un cabas Céline à la main, qui prend Bill par le coude, se colle à lui et dit : Votre beau taxi nous manque, et l’embrasse.
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Palper
Pour ceux qui en ont assez de se faire palper dans les aéroports parce qu’on a peur que vous fassiez sauter l’avion, pour ceux qui ne veulent plus bruler trente tonnes de kérosènes pour aller photographier des gazelles, pour ceux qui ont l’estomac fragile quand ils mangent ailleurs que chez eux, pour ceux qui trouvent que c’est compliqué de dire merci en Swahili, partez à l’aventure près de chez vous : dans les musées d’Histoire Naturelle.
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Café des Mouettes
« Au grand Café des Mouettes, une installation immersive reconstitue une épicerie du Mississippi qui a fermé ses portes et dont l’Américain a récupéré du mobilier ainsi que conservé et photographié de nombreux produits. »
Festival Images Vevey
www.images.ch/fr/
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regrettée
Silvia, ex-camarade regrettée d’unephotoparjour.ch, a troqué le Lumix pour la Petite Reine. Si elle porte une culotte adaptée à sa nouvelle passion sans rien dessous, (écris-le, me confie-t-elle), c’est pour la vivre intensément, (imagine-je).
Mais même si cette confession paraît un tantinet lubrique au premier abord, je pense que les fadas de la pédale sont souvent à poil sous leurs moule-fesses – sans doute pour mieux faire corps avec la Petite Reine.
Je me demande dans quelle mesure, porter un slip ou pas, permettrait aux photographes d’être plus performants ?
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Jamais
Solilok man.
Jamais, depuis que je le connais, une quinzaine d’année, il ne m’a posé une seule question. Où que nous nous croisions, dans un rayon de cent mètres, il m’interpelle avec un bruyant Salut, Salut ! Je réponds Salut. Alors il me parle alternativement de sa mère, de son fils ou de sa voiture. Ensuite comme apaisé d’avoir pu dégorger il replonge tête en avant dans son journal ou l’écran de son portable.
Aujourd’hui c’était : Je suis allé manger des filets de perches avec ma mère.
Salut.
Salut.
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Grand Tétras
Vernissage d’Hector, rue Albert-Cohen. Pendant que Nicolas fait le Grand Tétras pour séduire la demoiselle en rouge.
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laisser traire
Soit on devient aveugle au monde absurde qui nous entoure, soit il nous encholestérole la joie, soit on rue comme une vache qui ne veut pas se laisser traire.
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Héron cendré
Mystery man, l’homme au parapluie. Marmonneur solitaire qui transporte sa maison sur son dos depuis des années et toujours refuse l’aumône, le contact.
Tout de suite, bizarrement, je pense aux oiseaux en hiver quand il neige. Je me demande où ils vont ? Et lui ?
Je me courbe sur la vitrine, chargé d’un bouquet de roses blanches qui me sert de buisson et le photographie mais il ne me voit pas. Comme si sa solitude l’avait rendu sourd aux bruits du monde.
Rengaine mon petit X70 et jette à la volée, stupidement, quel choix dans ce magasin, et me tourne vers lui. A ce signal, avec la lenteur du héron, il se déploie malgré sa charge et s’envole.
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Réfugié
« Né en 1881 dans un grand et puissant empire […], il m’a fallu le quitter comme un criminel. Mon œuvre littéraire, dans sa langue originale, a été réduite en cendres. Étranger partout, l’Europe est perdue pour moi… J’ai été le témoin de la plus effroyable défaite de la raison […]. Cette pestilence des pestilences, le nationalisme, a empoisonné la fleur de notre culture européenne »
— Stefan Zweig, Le Monde d’hier. Souvenirs d’un Européen.
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énergiquement
Merde, mon café
Je me lève
Vous auriez un chiffon, s’il vous plaît
Une seconde, je suis occupée, je viens
Je la considère, vois d’abord son nez, nez d’acier qui protège les piliers des ponts quand les fleuves sont en crue
Elle se cloître dans son occupation, déplace des sacs en papier, en défroisse un énergiquement
J’admire son obstination à ne pas chercher à atteler son regard au mien
J’abdique, dit merci
A mon merci
Elle jette un je viens moins sec
De retour à table
Sourire et faire de l’accident une fête
Puis une image
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Soldat Machin
Héraclite, depuis, a été diversement interprété, récupéré, paraphrasé :
La mère : Si tu ne fais pas un effort à l’école, tu finiras balayeur.
Le Major : Soldat Machin, vous voulez changer le système alors gradez. Faites l’école d’officier. C’est d’en haut que vous le changerez.
Le patron : Vous voulez être augmenté ? Je vous demande simplement un engagement responsable, plus de présence et de conviction. Une pause cigarette toutes les heures et néfaste à votre santé et à l’entreprise.
Le curé : Pas le choix, tu terrasses le mal au fond de toi si tu veux une place en première à côté du Père.
L’amante : J’en ai connu de plus profondément engagés, chéri. Si tu veux me revoir il faudra que tu arrêtes de m’appeler maman.
L’artiste : Il faudrait que je m’y mette, mais à quoi bon puisque tout n’est que vanité.
Etc…
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Feltrinelli
Madame, il y a quelqu’un qui vous colle aux basques – que j’aillais lui dire. Me suis retenu au dernier moment. Soit elle se marrait soit elle me passait une bordée. J’ai préféré faire l’image de cette image iconique (qui me semble bien être celle d’Alberto Korda) transformée en sac à main.
C’est l’éditeur Feltrinelli qui balance l’image sur le marché. À la barbe du photographe qui lui en avait offert un tirage. Feltrinelli a su faire prospérer le message révolutionnaire incarné par le Che et en même temps fait prospérer son compte en banque.
Mais la victoire du grand capital sur ces relents d’utopies révolutionnaires c’est au groupe Swatch qu’on le doit : la mise en boîte du Che dans une montre en plastique.
Et pour une soixantaine de balles, on peut se dire, en regardant sa montre : comme le temps passe !
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Il disait :
Il disait :
Peut-être l’usure, peut-être une histoire d’hormones. Et tu avais raison quand…
Je baisse alors les yeux, suspendu à ce quand… et veux très vite me dédire de ce que j’ai pu proférer. Souvent pour faire briller un bon mot. Merde ne pas avoir de responsabilité dans cette galère d’hormones et d’usure. Je relève les yeux de mon assiette, empoigne mon verre d’eau gazeuse et le regarde dans les yeux.
Quand quoi ?
Tu m’as dit un jour, dans les moments de crises, c’est parfois quelque chose d’aussi léger qu’une plume qui peut tout faire s’effondrer.
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rien à redire
«Alles perfekt!»
La puissance algorithmique alliée à une offre vestimentaire pléthorique, tel est le cocktail gagnant de l’entreprise allemande. En plus de la fameuse gratuité de l’expédition et des retours. Les consommateurs n’y trouvent rien à redire. Surtout les Suisses. Zalando ne communique pas ses chiffres par pays, mais l’entreprise a réalisé une croissance de plus de 34% en 2015 sur ses marchés historiques (Allemagne, Suisse, Autriche).
Sources Hebdo mars 2016
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Coagulant
Ce sont les esprits chagrins qui prétendent que chaque bouffée d’une cigarette retranche cinq minutes de vie d’un fumeur. Mais d’autre part la cigarette est aussi un puissant coagulant social. Et cultiver le lien, c’est scientifiquement prouvé, rallonge l’espérance de vie.
Voilà pourquoi j’ai toujours un paquet de cigarettes dans la poche. En sors une, entame la conversation avec cet autre qui déjà inhale, tout en jouant soit avec mon paquet ou avec une cigarette que je n’allume jamais puisque je suis non-fumeur.
Et hop, le tour et joué, déjà les sourires se frayent un chemin dans les volutes de fumées.
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fou
-Tu crois à la réincarnation ? Tu crois qu’on peut parler aux morts ?
-Oui, mais il faut les laisser partir en paix. Pour être en paix soi-même. Sinon on devient fou…
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Instantanément
Aux livres sur les quais de Morges, raté Belinda Cannone, Marie-Hélène Lafon, entraperçu Dany Laferrière, pas vu ni Zep, ni Sfar.
Pas grave, parce qu’un peu plus loin, la rencontre de cette dame qui promène sa théière sac-à-main m’a fait instantanément oublier ces rendez-vous manqués.
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Broyé
J’ai broyé mes effusions adolescentes.
Des centaines de pages. Grandiloquentes. Surchargées d’absolus qui se tirent la bourre.
Époques où l’amour ne s’écrit qu’en majuscule. Où les grands orgues de la musique que l’on imagine produire ne sont que les couinements du BIC qui cherche son chemin sur le papier.
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