Temps empilés
24/06/2016
Ce matin, assis à la terrasse de mon café préféré, je me prépare à entamer Le Fracas du Temps de J. Barnes.
Arrive un moustachu rigolard.
Bonjour ! Quel temps incroyable... vous vous rendez compte demain il pleut de nouveau et on va perdre dix degrés... franchement...
S'assied à côté de moi et lance :
-Un café !
-La pluie – dis-je pour être civil et ne pas passer pour autiste – la pluie, est un cadeau du ciel. D’ailleurs si vous étiez une limace, vous seriez ravi...
-Les limaces, oui, j’en vois plein, y en a partout...
-Une limace ou une marguerite... excusez la comparaison.
Puis l’homme, peut-être enhardi par cette pseudo familiarité, me raconte sa vie. Je ferme mon livre et l’écoute. Je me souviens juste qu’il bosse dans une carrosserie et de son indignation parce qu’on lui fait réparer une voiture, sur un parking, sous la pluie, etc... Je me lève, et à mon grand étonnement il se lève et me serre la main.
Je rejoins une autre terrasse, recommande un café, ouvre mon livre.
-Ça ne vous gêne pas si je m’assieds à votre table ?
Me dit un bel homme avec un visage en lame de couteau aux yeux de husky.
Je ferme le livre – mais non, je vous en prie – et ouvre le journal, Le Temps, le feuillette (alors que j’ai l’impression que c’est lui qui me feuillette, il est bientôt l’heure) et tombe sur un article sur l’écoute et souris. Mais me barricader derrière mon mur de papier ne dissuade pas cet inopiné interlocuteur.
-Quelle chaleur, si tôt, vous trouvez pas ? Ça vous gêne la fumée ?
Je ne vais quand même pas ressortir mon gag sur la limace. Non, non, bien sûr que non et secoue la tête.
-Je sais que c’est pas bien de fumer mais c’est ma première.
-C’est l’excès qui nuit – que je lance à travers le journal.
-J’en sais quelque chose, j’ai fait un AVC il y a six mois...
Mon Eh bien dis donc le rend alors intarissable. Il me raconte en détail sa vie, ses combats avec les assurances, etc... Je dépose alors le Temps sur le Fracas du Temps et écoute... tout amusé par ces collisions matinales et par ce soleil, enfin, qui fait fleurir les confidences.