mais enfin
20/04/2017
Chronique du marché de Colmenar.
Dans le ventre de sa petite voiture, il vend des fromages, du lomo et du jamon Iberico. Quanto ? Qué ? Que dices ? Jamon ! Une moitié, une moitié nous va… Gracias… aqui esta el cambio… Mais au moment de s’en aller, un surrégime de moteur nous fait tourner la tête. S’éparpillent alors dans les airs, comme des oiseaux effrayés, des chemises, du linge de couleur, des pantalons. Des tubes de métal se tordent, tout doucement, presque sans précipitation, d’autres cassent net avec un bruit d’os de poulet et se débarrassent de la toile qui les recouvre. Une camionnette blanche vient de débouler dans la pente sur les stands du petit marché de Colmenar, stoppée nette par une voiture heureusement garée en travers de la pente.
Nous sommes bouches-bée. Il faut quelques secondes pour que s’évapore notre sidération et comprendre ce qui se passe. Personne ne parle, pas un cri. Dans la camionnette une femme immobile. Je m’approche d’elle et entend un homme insister : mais enfin la pédale des freins c’est pas celle de droite, mais enfin… mais enfin…
Puis peu à peu des groupes se forment et enflent les palabres.
Le fromager nous interpelle : Un mètre de plus, vous vous rendez compte, un mètre et on était morts. Et presque solennel, un demi sourire aux lèvres : C’est une renaissance, merci, c’est une renaissance, nous sommes vivants…