Le lion est mort
07/01/2016
On est là. Sans savoir quoi dire. Certains silencieux. D’autres ravis de retrouver une vieille connaissance. Souriants d’être peut-être moins abrasés par la vie qu’un tel, qui vraiment en a bavé. Ou qu’une autre, mon Dieu, je ne l’ai d’abord pas reconnue. Mais la tristesse rôde dans les conversations, se faufile entre un soudain éclat de rire qui retombe vite, amorti par la pudeur. Oui c’est terrible de mourir quand on a été si vivant, conquérant, tellement engagé dans le partage. Quelle injustice !
Les conversations font la ronde autour de la femme du lion, digne, le chagrin enivré par toute cette sollicitude.
M’aperçoit alors Philippe, sourire fendu jusqu’aux oreilles, calotte en laine sur le crâne : Mon chéri, vient que je t’embrasse sur la bouche, et me touche, et m’enlace et rit comme un môme au milieu des groupes de vieux amis d’y il y a trente ans devenus grands-pères, grands-mères, certains avec encore du feu encore dans les yeux, d’autres épuisés par trop de plongeons dans des piscines vides.
Georges, le lion est mort et nous venons te saluer... Lance son grand ami dans cette antichambre du crématoire.
C'est fou comme il faut se sentir mortel pour se sentir vivre.